Interview

Pierre de Maere

Pour le magazine Côtes d'Armor de novembre-décembre 2023, Pierre de Maere s'est prêté au jeu du portrait chinois. Une occasion pour nous de l'interviewer et de connaître un peu plus ce jeune chanteur.

    • Pouvez-vous nous présenter votre parcours ?

    Je suis un auteur - compositeur - interprète belge. J’ai commencé la musique à l’âge de 10 ans. Je chante depuis que je suis tout petit avec des icônes comme Lady Gaga, Stromae... À l’âge de 11 ans, j’ai eu un iPod touch avec l’application GarageBand, qui permet de s’initier à l’art de la composition, de la production et c’est comme ça que je me suis mis à écrire et composer des chansons dans un anglais approximatif. Puis j’ai appris l’anglais à l’école donc je m’y suis mis véritablement. À 18 ans, j’ai eu un déclic, c’est le passage au français, car je me suis rendu compte que mon accent anglais était périlleux et atroce et on me l’a fait comprendre. Je me suis donc mis à écrire dans ma langue et ça a été une sorte de révélation, car pour la première fois, je me suis senti plus fidèle et plus proche de ce que je suis réellement. C’est à ce moment-là que la maison de disques parisienne Wagram est venue vers moi, suite à la publication sur la plateforme du premier morceau que j’ai écrit en français en 2020, ça s’appelait Potins absurdes. Ils sont tombés dessus tout à fait par hasard, on s’est rencontrés, j’ai envoyé quelques maquettes et on a signé pour plusieurs albums. C’est comme ça que l’histoire a commencé. J’étais alors à l’école aux Beaux-Arts en photographie, mais je n’y étais pas vraiment heureux.

    • Vous avez abandonné complètement la photographie ?

    J’adore la photo, elle est encore présente dans mon métier aujourd’hui et je suis le premier à avoir mon mot à dire sur les images qui font partie de mon projet. Je suis très investi dans le visuel. J’aimerais bien m’y remettre un jour ou l’autre, mais je n’ai plus du tout le temps, même si cela me passionne toujours autant.
    Avez-vous baigné tout petit dans la musique ?
    Pas tant que ça. J’ai des parents qui aiment bien la musique, mais sans en faire, sans chanter. Mon père écoute les chansons anglaises des années 1970 : Pink Floyd, Supertramp… Et ma mère plutôt des chansons françaises, les classiques : Françoise Hardy, Goldman, Cabrel…
    Mon grand frère, qui est mon ingénieur du son, s’intéresse à la musique depuis aussi longtemps que moi, dans un style plus éclectique. J’ai une culture musicale qui est un mix de tout ça. J’aime bien les chansons qui sont populaires, efficaces, qui vont à l’essentiel. Il faut que ça me parle dès la première écoute.

     

    • Comment trouvez-vous votre inspiration pour écrire ?

    Plusieurs cas de figure. Parfois, je peux raconter mes histoires, mais c’est assez rare. Dans la chanson la plus connue, « Je marierais un ange », c’est un peu mon histoire, car ça me représente absolument. Cette quête d’un idéal, très romantique, c’est tout à fait moi. Je l’ai écrite à l’époque où j’étais complètement amoureux d’un personnage fictif dans une série que je regardais. Je me suis fait la réflexion qu’en fait, je ne tombe jamais amoureux de vrais êtres humains. J’aime bien me créer des challenges tout à fait impossibles et tomber sous le charme de personnages qui n’existent pas, et cette chanson raconte un peu ça.
    J’aime bien aussi raconter les histoires qui ne sont pas forcément les miennes, car à 21 ans, écrire un album complètement autobiographique, c’est difficile. Dans ma vie, je n’ai pas encore vécu grand-chose, ça serait soporifique pour tout le monde. J’aime bien me mettre dans la peau de personnages. Le titre « J’aime ta violence », c’est l’histoire tragique d’un addict à la cocaïne qui la considère comme sa meilleure copine et qui a besoin d’elle pour se sentir la plus beau, le plus fort. Et ça ce n’est pas moi du tout. Dans « Mercredi », j’entre dans la peau d’un jeune homme qui refuse de grandir, ce n’est pas moi non plus. Ça varie entre les deux. Je puise beaucoup l’inspiration dans l’amour sur ce premier album, car j’ai une vision excessive de l’amour. Je l’imagine brûlant ou glacial et dans mes textes, j’aime être radical et le thème de l’amour permet ça. C’est donc une source d’inspiration intarissable.

    • Qu’avez-vous ressenti lors de la remise du prix de la révélation masculine lors des Victoires de la musique ?

    Je l’ai reçu des mains de Stromae qui est mon icône. C’était comme dans un rêve, j’étais euphorique, j’avais l’impression de vivre un moment de grâce. C’était une des plus belles soirées de ma vie. C’est la reconnaissance du métier. Comme beaucoup d’artistes je pense, j’ai le syndrome de l’imposteur d’une certaine façon. Je n’ai pas suivi de cours théoriques ni de solfège académique, et le fait d’être validé par des programmateurs, des festivals, des radios, ça fait beaucoup de bien.

    • Quel lien avez-vous avec les Côtes d’Armor ?

    J’ai un lien très fort avec les Côtes d’Armor, car ça fait 22 ans que j’y viens assez régulièrement. Au moins 4 à 5 fois par an, je passe une semaine, parfois un mois l’été, à Erquy, précisément où mes parents ont une maison de vacances. On y a de la famille aussi, dont un cousin de ma mère qui est belge et qui a épousé une Bretonne. Mes parents sont tombés amoureux du coin et moi aussi. C’est un endroit de quiétude, de calme absolu. Le premier morceau de mon album qui s’intitule « Les oiseaux » a été écrit intégralement en Côtes d’Armor. Le premier titre que j’ai composé avec mon iPod touch, c’était là-bas aussi pendant mes vacances avec ma cousine mi-belge mi-bretonne. C’est un climat qui me plaît, car c’est serein, il n’y a pas trop de monde, c’est beau et pas encore trop touristique. Je m’y sens chez moi. C’est vraiment magnifique et les balades y sont très belles. C’est beau de sortir de chez soi et se dire qu’on a la balade du Cap d’Erquy à portée de main.

    • Qu’aimez-vous en Côtes d’Armor ?

    J’aime l’atmosphère de zénitude, de quiétude, la beauté des paysages, la pureté. J’espère que c’est un endroit qui ne sera jamais saccagé par un tourisme de masse, c’est préservé et j’espère que ça le restera toujours. Et puis on mange plutôt bien. J’aime aussi la nature sincère des Bretons.

    • Avez-vous un souvenir à nous raconter dans les Côtes d’Armor ?

    J’en ai plusieurs : mon premier coup de foudre musical, c’était à l’âge de 7 ans, une femme qui chantait aux Sables-d’Or ; j’ai des souvenirs au casino aussi, pour mes 18 ans, j’y suis allé jouer. Et puis il y a le Carrousel de Guy sur le port d’Erquy. Je ne sais pas s’il existe encore, mais j’ai fait beaucoup de tours de ce manège.

    Ah si j'étais ...

    • Un lieu en Côtes d’Armor : Les Hôpitaux, là où on voit l’îlot Saint-Michel. C’est toute mon enfance, j’appelle ça la plage du bonheur.
    • Un rêve : Une vie en amoureux passée sur le lac de Côme.
    • Une couleur : Le violet. C’est à la fois romantique et dramatique. Sur ma pochette, il y a du violet et du rouge, je trouve ces deux couleurs très complémentaires. Il y a quelque chose de rétro et à la fois de futuriste : c’est une photo qui aurait pu être prise il y a 50 ans, mais qui pourra aussi être prise dans 50 ans.
    • Un animal : Un chien, car j’ai toujours besoin de l’approbation de quelqu’un, de compagnie, d’amour. Je donne beaucoup, mais il faut que je reçoive aussi.
    • Un mot : Romantique. Ce n’est pas que pour l’amour, c’est une vision des choses pleine d’enthousiasme. Je déteste les gens qui sont blasés. J’aime bien vivre les choses pleinement.
    • Un souvenir en Côtes d’Armor : Le carrousel de Guy sur le port d’Erquy. Je ne sais pas s’il est encore là, mais j’en ai fait beaucoup des tours de ce manège.
    • Une chanson : Message personnel de Françoise Hardy. Elle a une vraie sensibilité, mélancolie, une peur de passer à côté de quelque chose et ça me parle.
    • Un film : Kill Bill. J’aime bien l’idée de la revanche, de prendre une revanche sur la vie.
    • Un super pouvoir : Voler dans les airs. C’est un des plus beaux rêves que j’ai.
    • Un dessert : Un moelleux au chocolat. C’est mon dessert préféré et j’ai le cœur très tendre.
    • Une émotion : La joie. Je suis quelqu’un de joyeux.
    • Un personnage : Willy Wonka de Charlie et la Chocolaterie, c’est un personnage qui vend du rêve, qui est mystérieux. Il représente un univers à lui seul. Il est franc, il est drôle, il est cynique, mais il a un bon fond.

Article issu du n°
195
de Côtes d’Armor magazine

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